Complexes de nationalité

Dans un calme plat,

Qu’agite leurs cœurs,

Dans un silence bruyant,

Que rompt leurs souffles,

Deux vies miséreuses arabe et noire,

Font le gué aux frontières de l’espoir national.

 

Dans une salle de prière laïque,

Elles sont entourées de l’État, dieu de la nationalité,

Et de son prophète le Roi,

Qui depuis sa photo officielle,

Les couve de son regard officiel,

Ce regard si miséricordieux.

 

Elles attendent l’intercesseur de Dieu,

Le prêtre bourgmestre qui donne les sacrements publics,

Pour les amener enfin vers le messie,

La belgitude qu’on leur annonce depuis trente ans,

Pour lequel elles ont usé tant de prières,

Et tant de bougies.

 

Voici le prêtre bourgmestre qui arrive,

Les cloches sonnent à toute volée,

Par la volonté et la délégation de Dieu l’État,

Le corps du messie leur fut donné,

Enveloppé dans un certificat luisant,

Outil précieux pour soulager ces vies emplies de galère.

 

Alors que la vie arabe clamait haut ses nouveaux droits,

La vie noire se saisit volontairement du balai et de la serpillière,

Pour nettoyer de fond en comble la commune,

En guise de remerciements enrobés de complexes,

Ainsi deux intégrées venaient de naître,

Deux formes de citoyenneté aussi.