Le 30 juin est la date de la proclamation d’indépendance du Congo. Mais pas seulement. Elle est surtout la date de proclamation d’indépendance que tout Africain devrait intégrer dans son coeur en plus de celle de son pays. Je ne veux pas ici m’attarder sur la nature de cette indépendance. Tout le monde sait objectivement qu’elle est fausse et que ceux qui voulaient asseoir réellement cette indépendance en dehors de toute manipulation ont été massacrés: LUMUMBA et ses compagnons entre autres, mais pas seulement. Je voudrais plutôt me projeter vers l’avenir car le Congo est le pays qui se doit d’être le moteur d’une Afrique aux projets politiques, économiques, sociaux et culturels communs. Le Congolais doit se rendre compte de la responsabilité presque unique qui pèse sur son pays dans la lutte pour une Afrique développée et libre de choisir son propre destin.
Frantz FANON ne se trompait pas lorsqu’il affirmait que l’Afrique est une arme dont la gâchette se trouve au Congo. Aimé CESAIRE non plus ne se trompait pas en écrivant “une saison au Congo” sans y avoir mis les pieds. Ces hommes de lettres engagés connaissaient les enjeux que représentaient ce vaste territoire. Et lon sait le caractère souvent visionnaire des hommes de lettres.
LE CONGO: LE VRAI COEUR DE L’AFRIQUE
Kwame NKRUMAH dans son projet des Etats-Unis d’Afrique avait identifié le Congo comme étant le coeur de l’Afrique. Il avait entre autres proposé Kinshasa comme capitale de la confédération lorsqu’on l’accusa de vouloir faire du Ghana le centre de l’Afrique. Patrice LUMUMBA lui-même avait compris le sens de ce message et s’était laissé initier au panafricanisme par le président ghanéen en nouant avec lui des liens forts. De par sa situation géographique et stratégique, de par son étendue, de par ses ressources naturelles, minières et de par son capital humain, le Congo ne peut échapper à son destin panafricain.
Le Congo et les Congolais doivent comprendre qu’ils sont appelés à jouer tôt ou tard un grand rôle en Afrique. Cela dépendra largement d’eux. Aucun marché économique commun voulant couvrir toute l’Afrique par exemple ne peut se faire sans le Congo, véritable carrefour des voies navigables africaines. Aucune économie basée sur les énergies renouvelables qui sont celles de demain ne peuvent se faire sans le Congo, deuxième poumon vert du monde. Derrière ces exemples, le Congo doit comprendre la nature du leadership politique qui l’attend. Car si des intérêts économiques communs peuvent unir, une base politique est nécessaire pour renforcer cette union.
EVITER A TOUT PRIX LE PRECEDENT IVOIRIEN
Patrice LUMUMBA avait véritablement compris le sens du mot nationalisme. Le nationalisme sert à mobiliser les forces vives d’une nation pour se défendre contre ceux qui veulent la soumettre et l’empêcher de se développer à leur profit. Le nationalisme ne doit pas être dirigé contre ceux avec qui une nation a un destin commun et des intérêts convergents. C’est pourquoi les mots “ivoirité” ou “congolité” m’exaspèrent car ils sont souvent dirigés contre des frères africains avec qui les Ivoiriens et les Congolais sont condamnés à s’entendre et à bâtir des projets communs.
Après 1960, lorsque NKRUMAH proposait son projet d’union, le président ivoirien Houphouët BOIGNY le traitait de fou. Il affirmait que la Côte-d’Ivoire ne serait pas la vache à lait de l’Afrique. Dans son égoïsme, il pensait que les richesses de son pays ne devaient pas profiter aux autres. Fort du statut de puissance régionale de son pays, il avait décidé de mettre à sa botte les autres pays d’Afrique de l’ouest en les pillant de leurs ressources humaines les plus valeureuses. Les plus bons cerveaux ouest africains partaient travailler en Côte-d’Ivoire sans aucune retombée pour les autres pays. Une sorte d’immigration choisie avant l’heure. Pour couronner le tout, il avait incité à la mise en place d’institutions régionales taillées sur mesure pour les dictateurs ouest africains. Cette politique sema les germes de l’ivoirité, une sorte de xénophobie détestable où des Ivoiriens pourchassèrent d’autres Africains pour les tuer. Aujourd’hui dans sa tombe, Houphouët doit se retourner. Ce qu’il a semé a entraîné une guerre sans fin qui met à genoux son pays. L’oeuvre de NKRUMAH et de ceux qui ont suivi sa trace ont mis le Ghana sur de meilleurs rails même si beaucoup reste à faire. Le Congo dans son destin panafricain se doit d’éviter ce piège.
DES LEADERS DE LA TREMPE DE LUMUMBA
Vu nos régimes fort présidentialisés ainsi que nos économies pauvres et asséchées, la politique jouera toujours les premiers rôles dans l’édification d’un destin commun africain. Il n’ y a plus aujourd’hui de leader visionnaire de la trempe des pères de l’indépendance tels NKRUMAH, MODIBO KEITA, JULIUS NYERERE, PATRICE LUMUMBA et autres. J’estime qu’une éducation politique de longue haleine est nécessaire pour retrouver une génération d’hommes politiques qui privilégient le sort de leurs nations à leurs sorts personnels. J’ai été saisi par les paroles de certains Congolais qui interrogés sur la venue du Roi des Belges en attendaient des miracles. Je m’étais prononcé pour cette visite par courtoisie politique. Mais quand on voit que des citoyens ne comptent plus sur eux-mêmes et sur la force de leurs dirigeants mais plutôt sur la venue d’un Roi étranger sans pouvoirs pour amorcer leur développement, je me dis qu’une éducation politique neutre et objective de la masse est une nécessité absolue. Et ce mouvement doit s’amorcer dans tous les pays africains. Evidemment, ce ne sont pas les dirigeants corrompus actuels qui le feront. Commencer à l’intégrer dans nos têtes fera peut-être que notre génération l’amorcera et l’établira comme principe permanent sur le terrain.
Telles sont des idées que je crois nécessaires au Congo et à l’Afrique.
VIVE LE CONGO PANAFRICAIN!
Très bien dit cher Calvin. Certains points sont à approfondir quant à la place du Congo, mais ton pan africanisme me plait et est de surcroit une nécessité absolus pour le continent