Certains l’appellent encore le quartier “africain” de Bruxelles ; mais Matongé est-il encore vraiment africain ? Contrairement aux idées reçues, très peu de personnes d’origine africaine y vivent encore, chassées par l’envolée des loyers. Le quartier Matongé a pris d’autres couleurs, il a acquis un luxe les populations paupérisées ne peuvent pas se payer. Il est désormais le quartier des bobos nantis et des Français qui – pour le clin d’oeil – n’ont aucune obligation d’intégration. Matongé fait face aujourd’hui à plusieurs défis et est à la croisée des chemins. C’est son existence même dans son essence chaleureuse actuelle qui est en danger. Ken Ndiaye, militant de référence dans l’associatif est l’un des rares candidats aux communales à ouvrir les yeux sur le fond du problème, et qui, ne se campe pas uniquement sur la forme, comme le font certains qui n’ont que des slogans à la bouche. C’est pourquoi je publie ci-dessous sa tribune.
Candidat aux communales sur la liste Ecolo, Ken Ndiaye, socio-anthropologue et militant associatif de longue date tire la sonnette d’alarme sur le risque de disparition que court Matongé le quartier “africain” de Bruxelles. Une tribune pertinente.
“Matonge va-t-il disparaître ?
La question est de plus en plus débattue.
Parmi les facteurs explicatifs de la renommée, du dynamisme et de la richesse de notre commune Ixelles, figure, jusqu’ici, sa mixité sociale et culturelle.
Au cœur d’Ixelles, Matonge constitue un véritable poumon économique et le lieu de la rencontre sociale par excellence, impliquant bien au-delà des Subsahariens.
Le rôle historique qu’y a joué la communauté originaire d’Afrique subsaharienne, du Congo notamment, fait partie intégrante, à la fois de la mémoire collective des Belges mais aussi de l’Afrique entière. « Indépendance cha-cha », devenu l’hymne des indépendances, y a été composé.
Les enquêtes d’opinion en ont régulièrement donné l’image du quartier le plus chaleureux ; mais aussi, socialement et culturellement, le moins ghettoïsé de Bruxelles.
Malheureusement, ce modèle de cohabitation harmonieuse où, pratiquement 150 nationalités différentes ont cohabité sans heurts particuliers, est de nos jours menacé.
Spéculation immobilière, « gentrification », petite délinquance et incivilités, évolutions sociologiques insuffisamment accompagnées et difficultés économiques pour les commerces, notamment, inquiètent une frange grandissante de la population.
La fracture économique repousse progressivement les populations vers les communes périphériques.
Qu’il soit d’habitation, de passage ou de consommation, nous n’avons pas le droit de nous désintéresser de son sort. Ou d’en laisser donner cette image de plus en plus dégradée.
Il faut ardemment le préserver afin qu’il demeure ce magnifique lieu de vie et d’échanges qu’il a toujours été.
J’aime Ixelles, j’aime Matonge. J’y vis et j’y entreprends avec un enthousiasme sans cesse renouvelé. Ce quartier mérite les moyens de sa survie !
Il occupera une place de choix parmi mes priorités d’action, si je suis élu.”
Ken NDIAYE,
Socioanthropologue, artiste et militant associatif
N° 41 Liste Ecolo