Sénégal : le clan qui préparait une république aux contours monarchiques

Article publié le 18 juillet 2011.

Plusieurs fois, lors de débats sur la politique africaine et l’absence de souveraineté dans le chef de pays africains, on m’a accusé de toujours taper sur la Françafrique et les puissances occidentales, oubliant de dénoncer quelque fois les vices que cache l’Afrique elle-même. Je donne raison à mes détracteurs en affirmant qu’il faut absolument savoir balayer sa maison avec courage, même si certains s’emploient de l’extérieur à y amener de la poussière. Comme le dit le proverbe du pays kabyè au Togo: ” la sorcellerie ne fait des dégâts dans la famille que parce qu’un sorcier issu de cette famille l’y a amenée”.

Abdoulaye WADE se trouve aujourd’hui parfaitement dans le rôle du bon génie qui passe du côté obscur et devient sorcier malfaisant. Où en Afrique n’a-t-on pas envié le “Sopi sénégalais” en 2000? Le slogan du changement porté à l’époque par un avocat réformiste, plein d’enthousiasme et porteur d’une idée de souveraineté africaine, charmait tout le continent. Même l’idéologie libérale dont il se réclamait avait été mis de côté par ses adversaires de la gauche africaine pour l’aider dans sa marche vers le pouvoir, convaincus d’avoir affaire à un démocrate qui ouvrirait la voie à des alternances démocratiques partout en Afrique.

Aujourd’hui celui que l’on surnomme “le vieux Gorgui” est devenu l’ombre du personnage précédemment décrit. Il s’est transformé en autocrate ratatiné qui s’accroche au pouvoir, et qui ne sait pas dire NON aux ambitions capricieuses et nauséabondes de son fils. Il est tellement obnubilé par l’avenir politique de son enfant qu’il en est venu à “s’agenouiller” devant la France, qui a adoubé Karim le fils, et qui travaille auprès d’Obama pour que ce dernier l’adoube à son tour. La présentation de Karim Wade à Obama par Sarkozy au sommet du G8 de Deauville en France en est une illustration.

WADE veut imposer son impopulaire de fils à sa place. Mais c’est mal connaître le peuple sénégalais. Ce peuple rompu aux joutes politiques, épargné par les dictatures oppressantes et sanglantes, ayant goûté à l’alternance, est très jaloux de sa liberté démocratique qu’on veut lui arracher. Et il est prêt sans doute à causer encore plus de misères au clan WADE,  surtout après les révélations d’Albert Bourgi, membre influent de la nébuleuse mafieuse de la Françafrique selon lesquels Karim WADE l’avait sollicité pour faire intervenir les forces françaises contre le peuple, au plus fort des manifestations contre les coupures intempestives d’électricité. Rappelons au passage que Karim WADE est ministre de l’énergie…

Le clan WADE marche donc sur des oeufs et au lieu d’une république construite selon leur volonté de succession monarchique, ils pourraient se retrouver dans une république qui leur deviendra étrangère, qui les chassera vers un exil, dans une République où la colère contre cette succession monarchique a valu à un Roi d’avoir la tête coupée. L’exil du clan WADE, ce sera la France peut-être…